Un roman sportif maintenant complet de 42 pages en 18 chapitres, écrit en 3 parties, entre le 18/06 et le 01/11/1995.

dimanche 6 juillet 2008

Chapitre 3: Et l'aventure continue...

A Buenos Aires, on est bien content d'accueillir les Grands Prix de Formule 1. Pendant une dizaine de saison, la F.I.A. a ignoré l'Argentine. Aujourd'hui, les monstres sacrés sont très bien venus sur le circuit argentin. Les spécialistes n'ont pas oublié les surprises de Rio. Les moteurs Peugeot, Mercedes et Mugen ont confirmé. Les Toyota ont fait preuve d'une fiabilité qui laisse à désirer, mais aussi de résultats extraordinaires, si on peut parler d'ordinaire en F1. Martin Brundle et Rubens Barrichello se sont réveillé à l'heure cette saison, toutes les conditions sont donc réunies pour assister de nouveau à un Grand Prix automobile passionnant.

Vendredi, le 9 avril. Forti et Simtek comptent bien participer à leur premier Grand Prix en ce début de saison. Les responsables de la course ont décidé de n'éliminer que quatre voitures à l'issue des préqualifications, puis quatre autres à l'issue des qualifications. Les écuries conviées à la corvée du vendredi matin sont les mêmes qu'au Brésil. 11h, les Toyota sortent dès l'ouverture de la session préqualificative. Trois tours pour Noda, trois pour Nakajima et les voitures rentrent aux stands. Les deux japonais ne seront pas battus. Les éliminés de la première heure se nomment Warwick et Gachot (deux fois Pacific Lotus), Moreno (Forti) et Dalmas (Venturi), ce dernier n'ayant même pas accompli un tour. Ces éliminations sur une séance de 1h30 ne conviennent à personne et le règlement sera modifié par la suite.
Après une séance libre à 13h, les voitures ont toutes déjà subi un certain nombre de réglages, la plupart sont prêtes pour 16h. Les horaires du vendredi seront elles aussi revues, et plusieurs propositions ont évoqué le fait de placer les premières sessions dès le jeudi. Ecclestone et son supérieur Mosley ont tout le week-end et quelques jours pour y réfléchir, afin que les protestations ne viennent pourrir l'ambiance de l'épreuve d'Imola.
16h. Les Toyota (encore elles !) ouvrent la séance. Elles sont suivies des March, des Sauber et des Ligier. En 7 minutes, les deux Toyota se hissent 3 secondes devant les Sauber. Les Minardi et les Arrows Footwork n'y changeront rien. Puis, Blundell et Berger entrent en scène et complètent les quatre premières places. A la mi-séance, le classement est le suivant : 1.Nakajima, 2.Noda, 3.Hill, 4.Schumacher, 5.Alesi, 6.Irvine, 7.Blundell,... Toujours une seconde d'avance sur le 3e. C'est effectivement Damon Hill qui se montre le plus dangereux pour les Toyota, mais rien de très gênant ! Chez Benetton et Ferrari, on décide de mettre le paquet pour la deuxième partie. C'est d'abord Schumacher qui prend la troisième place, puis Berger qui prend la 5e, enfin Herbert devance Alesi. Mais le jeune français ne s'en laisse pas compter et se place devant Hill. Finalement Coulthard viendra jouer les trouble-fêtes, mais rien de menaçant pour les Rouges et Blancs nippons. Classement provisoire : 1.Noda, 2.Nakajima, 3.Schumacher, 4.Berger, 5.Coulthard, 6.Alesi, 7.Herbert, 8.Hill,...

Samedi, le 10 avril. Les supporters envahissent les gradins depuis le petit matin. La journée promet d'être spectaculaire, en début comme en fin de classement. Les fanatiques de la Scuderia Ferrari restent les supporters les plus nombreux. Mais de plus en plus de japonais font leur apparition et se mêlent aux gens qui suivent Williams ou McLaren... Ce matin-là sent la poudre. En effet, encore beaucoup de surprises et de suspens toute la journée au programme.
Schumacher et Nakajima ont fait le spectacle pour la séance libre, d'autres s'en chargent pour les qualifications officielles. Berger et Alesi sont prêts pour de grandes aventures, ce sont des chasseurs de points. Cette année, la Scuderia vise le titre des constructeurs pour redorer son blason. C'est ainsi qu'à treize heures, Jean Alesi, comme il en a pris l'habitude, entre le premier en scène. Ensuite, Frentzen, Lagorce, Badoer, Blundell et Salo prennent sa roue, sans pouvoir déstabiliser le pilote avignonnais. Les Toyota persistent à rester intouchables. Schumacher et Herbert n'y peuvent rien. Au contraire, Nakajima va battre le temps de Noda en quatre tours, il n'aura plus besoin de revenir. Hill et Brundle sont eux aussi contraints à la figuration. Comas, un peu effacé jusque là, bénéficie d'un tour clair et se positionne en 4e ligne. A un quart d'heure de la fin de la session, Alesi pulvérise son temps de trois quarts de seconde et arrive à une demi-seconde de Noda. Irvine et Barrichello prennent possession de la 5e ligne, Berger se dépêtre en fin de séance et prend une belle 6e place. Le point sur le classement : 1.Nakajima, 2.Noda, 3.Alesi, 4.Schumacher, 5.Hill, 6.Berger, 7.Brundle, 8.Comas...
Les managers sont furieux en cette fin de séance. Mais qu'ont ces voitures pour être si facilement devant nos champions de toujours. Niki Lauda est perplexe. John Watson, Alain Prost et Ron Dennis se concertent, il semble que les Toyota constituent l'ennemi numéro un des écuries de pointe. Le samedi soir s'avance et chez Peugeot les ingénieurs travaillent becs et ongles pour au moins renouveler la performance de la course précédente dans laquelle un moteur de la firme de Sochaux s'était hissé à la seconde place. Mais Renault, Ferrari et évidemment Toyota semblent encore un peu mieux.
Du côté des places pour la qualification, les batailles ont été rudes entre les Simtek, les Arrows, Zanardi (Forti), les March et même les Tyrrell. Dans un rush final, Zanardi a sauvé sa peau, laissant aux deux Simtek (Verstappen et Alboretto), à Inoue (March) et Morbidelli (Arrows) les mauvaises places. Ce sont donc ces quatre pilotes qui n'auront le droit de disputer le Grand Prix d'Argentine. Le circuit quelque peu bosselé avantage les Toyota, possesseurs d'un moteur un peu plus souple que le Renault et tout aussi rapide que le Ferrari; c'est pourquoi John Barnard, directeur technique de la Scuderia travaille sur un nouveau V10 depuis quelques mois, doté d'une souplesse qui pourrait rivaliser avec celle du moteur japonais.

Dimanche matin, Gerhard Berger se sent mal, il a un mauvais pressentiment D'ailleurs, au Warm-up, il ne réalise que le 15e temps. La séance est très nettement dominée par les Toyota. Brundle, Schumacher et Alesi luttent pour les places d'honneur. Le pilote autrichien sort à plusieurs reprises de la piste, pourra-t-il assurer sa participation ? Il est vrai que des problèmes dans sa vie privée ne sont pas là pour l'aider, lui l'homme de fer de la F1 ! En rentrant aux stands, il percute De Cesaris en tête-à-queue. Nerveux et fatigué, Gerhard a un bref entretien avec Niki Lauda, la légende, et Jean Alesi. Ensuite, il se réfugie à son hôtel. Pour les journalistes, pas moyen d'en savoir plus !
Dans l'équipe nippone, on paraît serein, mais pas trop, on garde son sérieux de toujours. Ce n'est pas facile d'avoir la nette impression d'être seul contre tous. En réalité, en dehors des quelques affinités individuelles, toutes les équipes jouent leur carte indépendamment des autres : elles sont toutes dans cette situation. Chez les Rouges et Blancs, on attend une victoire, pour faire oublier la contre-performance (relative) de Rio. C'est ainsi que Nakajima a fait le choix de ne stopper qu'une seule fois, coup de poker, puisque tous les autres pilotes ont prévus de s'arrêter deux fois. De toute manière, chez Toyota, et là est la différence avec les autres écuries, on ne se soucie pas de la tactique des adversaires. Les responsables ont quand même passé deux saisons à étudier ce projet de Formule 1, toutes les tactiques ont été assimilées à fond... à la japonaise !

Le 11 avril à 14h, Buenos Aires. Gerhard Berger est sur la 3e ligne. Les moteurs rugissent de plaisir, surtout pour les spectateurs, qui vont avoir droit à un fantastique spectacle. Le départ est donné, les Toyota sont intouchables, mais derrière la lutte est terrible. Comas, Brundle et Berger se livrent à un combat des plus passionnant dans ce premier tour. Malheureusement dans le quatrième virage, Berger tente de repasser Comas et le duo s'accroche en emmenant Brundle en plein freinage. Les trois voitures sont immobilisées au milieu de la piste. Heureusement les commissaires font un travail parfait et le pire est évité. Pourtant, il va falloir interrompre la course. Comas et Brundle ressortent de leur véhicule un peu secoué. Berger ne bouge pas. Automatiquement, le britannique et le français vont vers l'autrichien. Lorsque l'anglais approche Berger, il reçoit une poussette très peu amicale du pilote Ferrari. Ce dernier se lève énervé voulant corriger le britannique, qui n'y est pour rien dans l'affaire. Le jeune français de chez Larrousse les sépare, les commissaires s'interposent à leur tour. Des millions de téléspectateurs ont assisté à cette scène extraordinaire sans que Gerhard Berger ait pu vraiment réaliser la situation.
Entre-temps, le "Pacecar" a ramené les voitures sur la ligne. Comas et Brundle repartent avec leur mulet. Berger, décidément à bout de nerfs, ne prend plus part au second départ. Il est raccompagné par Lauda qui est probablement le seul à pouvoir parler à son compatriote en ce moment. Devant, les Toyota restent implacables et Michael Schumacher se demande toujours comment elles peuvent prendre des départs avec une telle promptitude.

14h20, le nouveau départ est donné, sans Berger sur la troisième ligne. Nouvelle catapultée des Toyota en tête, Alesi et Schumacher luttent pour la troisième place. Hill, Brundle, Frentzen, Blundell et Herbert complètent la tête de course. Lorsque les voitures repassent sur la grande ligne droite, Noda est devant Nakajima, 2 secondes devant Schumacher, Alesi et Hill. Le brésilien Barrichello est condamné à l'abandon pour panne électronique, même conséquence que pour Panis dans la ligne droite précédente. Hill est dans la roue d'Alesi, mais le français résiste, pendant qu'en tête les japonais creusent leur écart. Schumacher est le premier à rentrer à son stand, en sortant il passe derrière Alesi, et devant Hill.
15h. Le tiers de la course est passé. De Cesaris, Brundle et Helary ont abandonné. Martini et Zanardi sont déjà à trois tours de Nakajima. Celui-ci compte 9" d'avance sur son coéquipier, qui en compte 7 sur Alesi. Hill et Schumacher se dispute la quatrième place. La tactique de Nakajima porte ses fruits, il va effectuer un arrêt à la mi-course, alors que les autres concurrents devront rejoindre une deuxième fois les stands avant la conclusion de l'épreuve. Coulthard effectue une belle remontée et se situe à la porte des points, mais il est freiné par des attardés. Jean Todt ordonne à Alesi de lever le pied, car à la poursuite des Toyota et dans sa célèbre fougue, sa consommation de carburants est trop importante. L'avignonnais s'exécute.
A 10 tours de l'arrivée, peu de choses ont changé. En dehors des sorties de route de Badoer et Katayama, toutes les voitures sont en course. Zanardi est d'ores et déjà à 5 tours et ne peut plus rien espérer. Devant, la tactique paie. Nakajima domine Noda (8"), Noda domine Alesi (9"), Alesi domine Schumacher (7"). Hill est maintenant distancé et suivi par Blundell à 1". Les supporters de Buenos Aires sont donc en train d'assister au premier succès des Toyota en F1, et quel succès !

Mais, petit à petit, le moteur nippon semble s'essouffler, et Alesi, qui un moment avait pensé laisser tomber, se rapproche de Noda. Ce dernier se rapproche d'autant plus vite que Nakajima perd une demi seconde de plus que lui à chaque tour. A 6 tours de l'arrivée, Jean Alesi bat le record du tour. Pourtant, dans le camp italien on reste tendu, le pilote français aura-t-il assez d'essence ? Jean Todt prend alors une décision difficile. Il invite le pilote de la Ferrari 27 à ralentir pour pouvoir terminer le Grand Prix d'Argentine. Alesi ayant Noda dans son collimateur ne peut se résoudre à céder devant proie aussi facile. Mais le japonais reste redoutable et bénéficie de la lutte entre Frentzen (Sauber) et Salo (Tyrrell) pour maintenir l'écart qui le sépare du successeur de Gilles Villeneuve. Jean, en alerte rouge, lève alors le pied et assure une place d'honneur, alors que dans les derniers moments il doit encore se battre pour maintenir sa place sur le podium.

C'est donc Nakajima qui emporte cette épreuve du Championnat du Monde, juste devant son coéquipier Noda et le jeune français, auteur d'une course flamboyante de générosité.

1. S.Nakajima Jap Toyota 10 pts
2.
H.Noda Jap Toyota à 2" 6 pts
3.
J.Alesi Fra Ferrari à 6" 4 pts
4.
M.Schumacher All Benetton Renault à 7" 3 pts
5.
D.Hill Gbr Williams Renault à 55" 2 pts
6.
M.Blundell Gbr McLaren Mercedes à 1 tour 1 pt

Pour la première victoire de Satoru, Toyota prend la tête au championnat du Monde des constructeurs, alors que le joyeux pilote de la voiture numérotée 35 se trouve en tête au classement du Championnat du Monde des pilotes à égalité avec Brundle, aucun coureur n'ayant marqué des points dans les deux courses. Maintenant tout le monde a trois semaines pour cogiter sur les événements des 2 derniers Grands Prix, améliorer ses performances ou simplement récupérer de ces deux semaines sous un soleil incessant.

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