Un roman sportif maintenant complet de 42 pages en 18 chapitres, écrit en 3 parties, entre le 18/06 et le 01/11/1995.

dimanche 20 juillet 2008

Chapitre 10: Nigel for ever

La grande surprise de ce Grand Prix de Silverstone est le retour de l'équipe Toyota après la disparition tragique de Noda. Mais, l'effet le plus surprenant est produit par un autre grand retour. Nigel Mansell, le vétéran britannique, reprend le volant pour l'écurie Toyota Formula One, équipée d'un nouveau moteur, dont l'élaboration a pris à peine 10 semaines. De ses propres mots, l'anglais vient à Silverstone, et pour le reste de la saison, apporter son expérience aux Japonais. C'est en effet un renfort de choix qu'ont obtenu les dirigeants nippons, qui visent toujours plus officiellement le titre des Constructeurs. Simtek Lola ne donne à ce moment plus de nouvelles concernant une reprise d'essais quelconques de Formule 1.

C'est un temps mitigé qui accueille le passage du paddock sur les îles britanniques. Silverstone est un circuit pseudo-rapide, sur lequel les réglages moteurs et aérodynamiques sont très importants. Le fantastique succès d'Hill l'an passé est l'objet de toutes les évocations de souvenirs. Mais en ce milieu de saison, le champion du Monde Schumacher semble vraiment très difficile à battre à la régulière. Les Ferrari, condamnées à l'exploit pour gagner, attendent déjà avec ferveur le prochain rendez-vous à Hockenheim, où leur nouveau moteur fera son apparition. Selon John Barnard, Ferrari devrait gagner quelques courses avec la future élaboration du moteur actuel. Mais le retour d'une écurie à la compétition conduit les dirigeants responsables à mettre au point une nouvelle formule concernant la préqualification. En fait, on reprend ce qui a été choisi à Monaco, c'est-à-dire 3 non préqualifiés, puis 3 non qualifiés.

Dans le but d'éliminer trois voitures, on retrouve toutes les écuries n'ayant pas encore marqué de points ce jeudi à 14h. Tyrrell, Arrows Footwork, Pacific Lotus, Forti Corse et Minardi doivent en découdre pour participer au Grand Prix ce dimanche. Vite, les deux Forti semblent en difficultés. Moreno et Martini ont un mal fou à régler leurs bolides. Bertrand Gachot (Pacific) rejoint les deux malheureux pour former le trio de fin de classement de la première épreuve partielle chronométrée. Il fait un peu frais pour un 15 juillet en ce soir couvert, mais Nigel Mansell est comblée. Il peut à nouveau assouvir sa passion, belle revanche pour lui qui estime avoir été jeté l'année dernière comme un malpropre par Ron Dennis. Les responsables toyotistes lui font pleinement confiance et Nigel apprécie cela.

Vendredi matin, il pleut sur Silverstone. Les essais libres ont vu une très grande surprise : Mika Hakkinen en première position devant Schumacher, Mansell et Alesi. "Les fous furieux", comme les appelle René Arnoux, se sont montrés. Il est difficile de juger sous la pluie, mais il semble que le nouveau Toyota est au point. Hill et Brundle n'ont pu se mettre en évidence, mais ils comptent bien sur l'arrêt de la bruine pour atomiser tout le monde. 11h. Les 10 voitures dans la course aux préqualifications tentent d'améliorer leurs résultats. Mais l'eau empêche tout changement dans le classement et Moreno, Martini et Gachot sont éliminés. La pluie cesse de tomber vers midi. Le soleil se fait encore discret. Mansell est très entouré, les journalistes l'assaillent et le soir arrivé, il se couche avec bonheur. Mais tout d'abord, le gros de la journée : les qualifications. Schumacher, en tête au championnat, met le paquet d'entrée : 1'25"633. Les Jordan, Venturi et les Larrousse ne rivalisent pas avec le Champion du Monde : Entre 1'26"879 (Irvine) et 1'29"708 (Dalmas). La mécanique Peugeot est moins à son aise en Angleterre qu'en France. Le premier tiers temps est atteint. Schumacher est suivi par Hill (1'25"996) et Hakkinen (1'26"111). Le pilote finlandais surprend encore une fois, mais son talent n'a pas toujours été jugé au bon niveau. Ron Dennis resplendit, l'horizon d'une place sur la deuxième ligne avait disparu avec le départ de Senna en 94 pour Williams et le moteur Renault.

Dans la deuxième partie de cette séance, Mansell accomplit 5 tours exceptionnels et ravit la quatrième place à Herbert en 1'26"759. Les deux Ferrari ne brillent pas : 1'27"255 pour Berger (7e) et 1'27"827 pour Alesi (10e). Mais ce n'est pas fini, et Nakajima vient en trouble-fête : 1'27"248. Les Sauber, en retrait, ne font que plus de 1'28, les Ligier leur passent devant (1'27"903 pour Panis et 1'28"410 pour Coulthard). En fin de séance, la Benetton n°1 réalise 1'25"204. Mais Mansell est de plus en plus fort et améliore son temps d'une demi-seconde. Le britannique est survolté. Il se livre même à un duel d'anthologie avec le français Alesi, le tout sur une piste presque sèche. La Ferrari n°27 fait 1'27"004 et la Toyota 1'26"601. Après tant de chiffres, Mansell a droit à une pluie d'interviews, le soir il est épuisé mais fier de lui. Le lendemain, on publie même : "Je serai Champion du Monde !" dans les gazettes d'outre-Manche.

Samedi, il fait très beau sur Silverstone. Les essais libres sont l'objet d'une nouvelle surprise. Hill domine Nakajima pour seulement 3 millièmes ! Mansell croule sous les ennuis : la boîte de vitesse, la transmission, les suspensions, les ailerons et les pneus lui créent une avalanche de problèmes. Il fait pourtant le 7e temps dépassant les deux Ferrari d'une courte tête. L'après-midi arrive, il est 14h, c'est parti pour la dernière séance. Hakkinen taquine le chrono de Schumacher : 1'25"619, mais Brundle s'intercale : 1'25"520. Blundell confirme la forme du Mercedes Benz : 1'25"932. Mais Schumacher ne s'en laisse pas compter : 1'24"971. Hill réplique : 1'25"144, puis Mansell : 1'26"001, puis Berger 1'26"755. Hakkinen poursuit son effort : 1'25"404. Alesi, très concentré déçoit Niki Lauda : 1'26"968, mais Berger perfectionne : 1'26"613. Et, Mansell sentant la chance tourner de son côté, rabaisse ses ailerons, laisse un minimum d'essence dans son réservoir et pénètre son baquet avec l'extrême conviction qu'il va réaliser un exploit. Nigel se transcende et égalise Hill en 1'25"144. Herbert époustouflé ne fait que 1'26"483. A l'issue de la séance le tableau de marque indique :

1. 1 Schumacher Benetton 1'24"971 11
2. 5 Hill Williams 1'25"144 +0.173 11
& 36 Mansell Toyota 1'25"144 +0.173 12
4. 8 Hakkinen McLaren 1'25"404 +0.433 10
5. 6 Brundle Williams 1'25"520 +0.549 10
6. 7 Blundell McLaren 1'25"932 +0.961 9
7. 35 Nakajima Toyota 1'25"988 +1.017 11
8. 25 Coulthard Ligier 1'26"003 +1.032 12
9. 2 Herbert Benetton 1'26"483 +1.512 10
10. 28 Berger Ferrari 1'26"613 +1.642 12
11. 14 Irvine Jordan 1'26"879 +1.908 8
12. 27 Alesi Ferrari 1'26"968 +1.997 11
Etc.

La déception chez Ferrari est aussi énorme que la joie chez Toyota. Néanmoins, les sourcils se froncent quand on apprend que Mansell ne partira qu'en deuxième ligne pour avoir effectué douze tours, alors que Damon Hill, son compatriote, n'en a fait qu'onze. Ce point particulier du règlement n'apparaît pas souvent, mais on l'a déjà utilisé pour départager des pilotes placés plus loin sur la grille. Cependant, le fait qu'une Toyota égale la performance d'une Williams sur un circuit favorable à l'écurie anglaise est révélateur d'un important potentiel. Les malheureux champions qui ne participeront pas au Grand Prix sont : Katayama (1'29"990), Warwick (1'30"618) et Lehto (1'30"626).

Dimanche matin, l'échauffement révèle quelques problèmes chez Williams et Benetton. Du coup, Mansell et Nakajima prennent la tête de la séance. Les Ferrari continuent à décevoir, ce qui fait dire à Jean Alesi : "Vivement l'Allemagne !". Hakkinen ne prend qu'une médiocre 10e place, mais cette séance n'est pas primordiale du point de vue des résultats purs. L'étonnant et détonant De Cesaris le prouve avec une belle 8e place. Ainsi, l'idole quadragénaire des britanniques va entamer sa saison dans les meilleures conditions, avec un puissant groupe japonais derrière lui. Chez Jordan, on est inquiet de l'instabilité des résultats. Eddie Jordan souhaiterait que Barrichello explose littéralement et se libère enfin. Irvine, lui, est un fougueux garçon, qui a parfois du mal à se contenir. Le moteur Peugeot souffre clairemant ici, et Jabouille le reconnaît mais insiste sur le fait que le moteur sera meilleur sur des circuits plus typés.

Dimanche 14h, le départ est donné. Pour une fois, Damon Hill passe devant Schumacher. Mansell et Hakkinen se calent dans leurs roues. Comas rate son départ, Helary, son coéquipier, ne peut l'éviter. Les deux voitures sont hors course et rapidement rejointes par Salo, victime d'une sortie de route fatale. Les yeux de tous les spectateurs sont rivés sur la Toyota n°36 de Nigel Mansell. L'enfant du pays est en quatrième position derrière Hakkinen et devant Nakajima, également auteur d'un bon départ. Au fil des tours, les deux pilotes de tête creusent le trou. Hakkinen, Mansell et Nakajima forment le groupe de chasse. Le gros du peloton contient, dans l'ordre, Brundle, Coulthard, Blundell, Berger, Herbert, Irvine, Frentzen, Alesi, De Cesaris, Lagorce et Barrichello. Les autres pilotes se voient très vite prendre des tours de retard. Au septième tour, Schumacher passe en 1'27"996. Ce temps n'est détrôné que dans le 20e tour par Jean Alesi, dans un retour effreiné vers les positions de tête. Malheureusement, il s'arrête quelques minutes avant l'heure de course pour une panne electronique.

A l'heure de course justement, le classement a subi quelques changements : 1.Hill, 2.Schumacher, 3.Mansell, 4.Hakkinen, 5.Nakajima, 6.Brundle, 7.Blundell, 8.Berger... Le temps est au beau fixe et les supporters britanniques sont déchaînés, 4 anglais figurent dans les sept premières places ! Mais Schumacher se fait de plus en plus pressant derrière Hill, il bat consécutivement le record du tour, après son changement de pneumatique. Il bat de ce fait le record absolu du circuit dans sa quatrième amélioration : 1'26"962. C'est à ce même moment que Brundle et Blundell s'accrochent en dépassant un attardé : ils terminent tous les deux leur course. Le même sort concerne l'attardé en question, puisqu'Inoue perd son aileron arrière et sort de la route alors que sa vitesse avoisinne les 300 km/h. En tête de la course, le moteur Renault réagit toujours en maître devant le Toyota qui tourne en moyenne en 1'28"3. La Ferrari n°28 de Berger, en sixième position et qui a bénéficié d'un bon travail des mécaniciens italiens, tourne maintenant en 1'28"6. Ensuite, vers le quarantième tour, une hécatombe sanctionne le moteur Peugeot, seul Irvine y résiste. En effet, Dalmas, Lagorce et Barrichello abandonnent suite à diverses pannes de transmission et de moteur.

A 15 tours de la fin, la Williams n°5 de Damon Hill ne compte qu'une seconde d'avance sur Schumacher, qui revient fort. Suivent Mansell, Hakkinen, Nakajima et Berger, respectivement à 13, 14, 29 et 45 secondes du leader. Les spécialistes sont très étonnés de la forme physique de Mansell qui, malgré son âge et son manque de compétition, tient la route. Puis, ce qui devait arriver arrive et... Schumacher double Hill. Ce dernier tente bien de réagir, mais rien n'y fait, l'allemand est en super-forme ! La chaleur devient pesante, Pier Luigi Martini gare sa voiture dans les box et sort ne pouvant plus soutenir le combat physique. Quelle décision courageuse, surtout lorsque l'on connaît la situation préoccupante de l'écurie Minardi, qui doit à chaque fois se dépétrer des préqualifications. Mais le jeune Luca Badoer remonte le classement petit à petit. S'étant élancé de l'avant dernière ligne, il a vite pointé en 17e position. Après les ravitaillements, le jeune loup s'est retrouvé 15e à 1 tour, mais dans la roue de Mansell, ce qui lui à permis de gagner quelques dixièmes précieux. Car le vieux Mansell roule toujours aussi bien. Il manie la Toyota comme il jouait de la Williams, lorsqu'il fut Champion du Monde en 1992. En fin de course, rien n'entrave sa forme. La sensation apparaît même dans le 54e tour, alors que les réservoirs libèrent quelques kilogrammes, Mansell bat le record du tour pour 1 centième en 1'26"951 ! Les cris de joies sont presque perceptibles sous le vacarme des moteurs rugissants.

Le vieux Nige' réduit son écart à 10 secondes, mais Schumacher a course gagnée. Le pauvre Panis abandonne à 6 tours de la fin, alors que sa boîte de vitesse est bloquée en 3e. Pour leur retour, les rouges et blancs (Toyota), placent leurs deux voitures dans les points et de quelle manière ! Alors qu'en début de saison, le moteur nippon s'essouflait en fin de course, il semble revigoré dans les derniers tours de Silverstone. C'est encore l'hymne allemand qui est joué sur le circuit britannique !

1. M.Schumacher All Benetton Renault 10 pts
2. D.Hill Gbr Williams Renault à 5" 6 pts
3. N.Mansell Gbr Toyota à 11" 4 pts
4.
M.Hakkinen Fin McLaren Mercedes à 15" 3 pts
5. S.Nakajima Jap Toyota à 39" 2 pts
6. G.Berger Aut Ferrari à 1'10" 1 pt

Herbert rate d'une demi seconde son entrée dans les points, c'est effectivement l'écart qui le sépare de Berger. Au classement général, Schumacher se dirige vers son troisième titre consécutif :

1. M.Schumacher All Benetton Renault Elf 45 pts 3v.
2. H.Noda Jap Toyota Formula One 20 pts 1v. +
et J.Alesi Fra Ferrari Spa 20 pts 1v.
4. D.Hill Gbr Williams Renault Elf 20 pts
5. G.Berger Aut Ferrari Spa 16 pts 1v.
6. M.Brundle Gbr Williams Renault Elf 15 pts 1v.
7. M.Hakkinen Fin McLaren Mercedes Benz 13 pts
8. S.Nakajima Jap Toyota Formula One 12 pts 1v.
9. D.Coulthard Gbr Ligier Mugen Honda 9 pts
et R.Barrichello Bré Jordan Peugeot 9 pts

Benetton va vers son second titre d'affilée, emmenant Renault vers son cinquième titre des Constructeurs/Motoristes :

1. Benetton Renault Elf 52 pts 3v.
2. Ferrari Spa 36 pts 2v.
et Toyota Formula One 36 pts 2v.
4. Williams Renault Elf 35 pts 1v.
5. McLaren Mercedes Benz 15 pts
6. Jordan Peugeot 12 pts
7. Ligier Mugen Honda 10 pts
8.
Larrousse Peugeot 4 pts
et Sauber Ford Zetec 4 pts
10.
March Mazda 2 pts
et Venturi Team Peugeot 2 pts

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